Selon une étude franco-canadienne qui vient d'être publiée dans la revue Nature, la résistance aux antibiotiques est antérieure à l'utilisation clinique des antibiotiques modernes.
Les chercheurs issus notamment de l'unité « Eco-Anthropologie et ethnobiologie » (MNHN /CNRS), ont, à la surprise générale, découvert des gènes bactériens de résistance aux antibiotiques parmi des échantillons d'ADN anciens.
Après des années de recherches sur l'ADN ancien du pergélisol des territoires du Yukon daté d'environ 30 000 ans, les chercheurs ont développé des méthodes permettant d'isoler des gènes particuliers de paléo-bactéries au Centre d'ADN ancien de l'université McMaster (Canada) et au Service de Systématique Moléculaire du Muséum national d'Histoire naturelle (UMS Outils et méthodes de la systématique intégrative), peut on lire dans un communiqué de presse.
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Selon une étude franco-canadienne qui vient d'être publiée dans la revue Nature, la résistance aux antibiotiques est antérieure à l'utilisation clinique des antibiotiques modernes |
On effet, les chercheurs se sont concentrés plus particulièrement sur une séquence du gène de la résistance à la vancomycine, un antibiotique très puissant de la famille des glycopeptides, généralement utilisé en dernier recours dans le domaine clinique. On constate depuis les années 80, des résistances à cet antibiotique qui provoquent dans le monde entier des flambées d'infections nosocomiales.
Cette découverte apporte un nouvel éclairage sur la compréhension de la résistance aux antibiotiques en démontrant l'ancienneté et le potentiel adaptatif de ces gènes. L'objectif des chercheurs est désormais de poursuivre leurs travaux dans le pergélisol remontant à 1 million d'années.
De premières bactéries résistantes aux antibiotiques ont en fait identifié dès les années 19401, mais comme de nouveaux antibiotiques étaient alors régulièrement découverts, à un rythme soutenu, l'antibiorésistance n'a pas, dans ce premier temps, attiré l'attention du public ou de l'industrie pharmaceutique. A la fin du XXème siècle, le consensus existait sur le fait que les impacts de l'usage excessif d'antibiotiques, aggravés par la rareté des nouveaux médicaments mis sur le marché pouvaient induire un risque de crise sanitaire mondiale à moyen ou long terme pour certaines maladies.
L'utilisation abusive de ces médicaments en médecine ne fait plus de doute, mais l'utilisation de grandes quantités d'antibiotiques dans l'alimentation animale est passée longtemps inaperçue comme cause d'antibiorésistance. Les antibiotiques sont massivement utilisés, de manière moins réglementée par les éleveurs et pisciculteurs, en actions thérapeutique et prophylactique, et de façon plus controversée comme facteurs de croissance et de gain de masse corporelle.
Il existe un double risque de transmission croissante de bactéries résistantes aux éleveurs et aux consommateurs de viande via la chaîne alimentaire1. Les épandages de lisiers et fumiers pourraient ainsi également poser problème.
L'OMS a officiellement invité (en 2003) les éleveurs à ne pas utiliser d'antibiotiques comme facteurs de croissance et à en user prudemment en thérapeutique2, mais c'est dans l'Union européenne que la question a d'abord été évoquée, et que la réglementation a commencé à freiner cette tendance, avec notamment 5 promoteurs de croissance (zinc bacitracine, spiramycine, tylosine, virginiamycine et olaquindox) interdit dans l'alimentation animale dans l'UE à partir de 1999.