Le 16 octobre dernier, associations et riverains se sont rassemblés devant la préfecture de Beauvais pour manifester contre le projet d'un deuxième incinérateur dans l'Oise.
A cet effet, les députées, sénatrices et sénateurs écologistes ont souhaité apporter leur soutien officiel à cette mobilisation contre le projet d'incinérateur de Villers Saint Sépulcre.
Depuis de nombreux mois, l'association citoyenne contre l'installation d'un incinérateur et pour la défense de l'environnement (ACCIDE) et l'association « Alerte aux déchets ! » multiplient les actions pour tenter de mettre fin à ce projet, peut on lire dans un communiqué de presse.
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Non à un deuxième incinérateur dans l'Oise |
« Bien sur l'installation d'un incinérateur à Villers Saint Sépulcre, ça peut laisser de marbre. Il suffit de s'engager à ne plus respirer, ne plus boire de lait produit localement, dire adieu aux légumes du jardin, au gibier et aux champignons, modifier son propre ADN pour le rendre dioxine-compatible », a déclaré l'ACCIDE dans un communiqué de presse.
« Mais si tout cela vous semble impossible, si vous n'avez pas envie de prendre rendez-vous au pavillon des cancéreux, si derrière les formules pasteurisées du Symove, vous savez traquer l'embrouille (et donc traduire unité de valorisation énergétique " en " épandeur de poison multi-forme, alors ne restez pas de marbre (') Le marbre du monument laissé aux Isariens par un préfet terminateur de Grenelle, c'est ce gros mastodonte Villersois qui, érigé avec les sous du contribuable, cimenté par l'apathie de l'electeur indifférent, jettera son ombre mortifère sur les générations futures, sommées de moins trier, abreuvées de mâchefers et de métaux lourds, discret tranformateur de déchets industriels parisiens,.... elle est pas belle la vie ? », ajoutait l'ACCIDE dans son communiqué.
Ces associations et les Verts/Europe Ecologie soutiennent le plan départemental d'élimination des déchets ménagers et assimilés (PDEDMA), porté par le Conseil général de l'Oise. Plus ambitieux en terme de réduction des déchets incinérés, il s'inscrit dans la droite ligne des engagements pris par le Grenelle de l'environnement en ayant pour objectif une réduction de 15% des déchets incinérés d'ici 2013. Il permet également, à terme, une vraie politique qui tienne compte de l'intégralité des enjeux de la filière (lutte contre le suremballage, généralisation de la pesée embarquée, méthanisation des déchets fermentescibles, recyclage et réparation des biens).
L'article L 541-14 du code de l'environnement indique que chaque département est couvert par un plan départemental ou interdépartemental d'élimination des déchets ménagers et autres déchets mentionnés à l'article L 2224-14 du code général des collectivités territoriales.
Le plan actuellement en vigueur dans le département de l'Isère a été approuvé par délibération du Conseil Général en date du 13 juin 2008. Il constitue un cadre de référence pour les différents acteurs de la gestion des déchets, définit la stratégie en matière de gestion des déchets et présente les réalisations nécessaires pour obtenir les résultats souhaités. D'un point de vue juridique, les décisions prises par les personnes morales de droit public et leurs concessionnaires dans le domaine de l'élimination des déchets doivent être compatibles avec les dispositions du plan.
Le PDEDMA a reçu un avis défavorable du commissaire-enquêteur suite à l'enquête publique menée dans l'Oise, alors même que 90% de la population s'était exprimée en faveur de ce plan. C'est donc le projet du sénateur UMP Alain Vasselle, président du syndicat mixte Oise verte environnement (Symove), et la construction d'un incinérateur qui est pour l'instant privilégié par les instances dirigeantes pour répondre à la problématique locale du traitement des déchets.
L'incinération des déchets est réglementée dans l'Union européenne par la directive 2000/76/CE. Certaines dispositions, concernant les cadavres d'animaux, sont régulés par le règlement (CE) n° 1774/2002, qui a été promulgué notamment à la suite des crises alimentaires des années 1990 (maladie de la vache folle, liée notamment à l'ingestion de farines animales par les bovins, etc.). En France, elle est réglementée en particulier par le livre V du Code de l'environnement sur la « prévention des pollutions ».
En France, en 2004, le Comité de la prévention et de la précaution a recommandé que « la question de l'incinération des ordures ménagères en France soit analysée et replacée dans le cadre d'une politique globale de gestion des déchets en France. Cette politique devrait s'articuler autour des axes suivants : la prévention, le renforcement de la réglementation et du contrôle de la conduite des installations, le développement de la recherche, la surveillance environnementale et des populations, l'optimisation des filières de traitement et une politique participative ambitieuse d'information et de sensibilisation du public et des acteurs afin de favoriser leur implication dans les processus décisionnels »
« L'incinération est une composante de la solution du problème du traitement des déchets mais, pendant vingt ans, l'investissement consenti sera à rembourser. Il faudra brûler le même nombre de déchets pendant cette période, et cela retarde d'autant l'instauration d'une politique de recyclage sur l'ensemble du gisement », explique à l'Associated Press Sébastien Lapeyre du Centre national d'information indépendante sur les déchets (CNIID).
Une étude publiée en novembre 2007 par l'Institut de veille sanitaire (InVS) « montre qu'il a existé une association significative mais pas de lien de causalité entre l'incidence de certains cancers et l'exposition aux rejets des incinérateurs construits dans les années 70-80 », évoquant « l'augmentation de certains cancers : chez la femme, le cancer du sein et chez l'homme, on ne note pas d'incidence significative pour l'ensemble des cancers car elles portent sur des maladies relativement rares ainsi le sarcome des tissus mous, le cancer du foie et les lymphomes malins non-hodgkiniens ». L'étude ajoute que ces cas représentent un nombre de 650 environ sur les 135 567 recensés dans les quatre départements dont les registres de cancers ont été relevés.
Le Syndicat national du traitement et de la valorisation des déchets urbains et assimilés (SVDU), qui rassemble les industriels, fait valoir une baisse de 97% des émissions de dioxines entre 1995 et 2006.
Le porte-parole de la Coordination nationale médicale santé-environnement note que si depuis le 27 décembre 2005, les nouvelles normes ont été mises en place, il n'y a pour le moment aucun recul épidémiologique suffisant. Il n'y a pas d'incinérateur propre car non seulement ils dégagent du dioxyde de carbone, mais en plus près de 2 000 substances toxiques n'ont pas, elles, fait l'objet d'étude sur leur impact sanitaire.
Aussi, les pétitions du corps médical fleurissent dans la plupart des régions concernées par un projet d'incinérateur. Toutes réclament un moratoire sur la construction de nouveaux incinérateurs.
Des centaines d'associations dans le monde s'opposent à l'incinération. Elles dénoncent les risques encourus par les populations habitant à proximité des incinérateurs, et notamment les menaces de cancer. Il existe des alternatives pour tout ou partie des déchets comme la réduction des déchets à la source, la méthanisation des déchets organiques, le recyclage et le compostage.
Aux États-Unis, dans les années 1990, 300 projets sur 400 ont été stoppés par une opposition citoyenne.
En France, la législation sur la qualité de l'air ayant évolué, de nombreuses usines d'incinération ont dû être mises aux normes ou fermées depuis les années 1990. Des polémiques subsistent aussi sur l'impact à long terme de l'utilisation de mâchefers en fond de couche routière ou pour divers aménagements.
Déjà soutenues au printemps dernier par les élus Europe Ecologie de Picardie, les associations de riverains peuvent désormais compter sur l'appui des parlementaires qui voient dans cet incinérateur le symbole des renoncements de la politique environnementale du gouvernement. Ces mobilisations peuvent être synonyme de victoires comme on l'a vu dernièrement avec l'annulation de l'autorisation de construction de l'incinérateur de Flamoval à Arques (Pas-de-Calais).