La Banque Mondiale, en prêtant des millions de dollars pour transformer la côte fragile et désertique du Pérou en vaste prairies agricoles verdoyantes, a mis les pieds dans un champ de batailles digne des guerres de l'eau qui sévissaient dans les années 1930 à Los Angeles.
Lorsqu'un employé de la Banque Mondiale s'est rendu en Avril au Pérou pour enquêter sur des plaintes selon lesquelles des emprunts avaient accéléré l'assèchement des aquifères Ica, il a été abattu après s'être rendu sur un territoire remplis de puits clandestins.
Bien que la Banque Mondiale et sa Corporation Financière Internationale aient été impliquées dans un projet plus durable au nord du Pérou qui utilise l'eau venant de l'Amazone pour irriguer les champs agricoles, leur travail avec les puits d'eau à Ica les ont mis dans une situation compliquée.
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La crise de l'eau est réelle, et les agriculteurs de petite et de moyenne taille sont menacés |
Le Pérou est le troisième plus grand pays d'Amérique du sud et est un exportateur important de cultures spécifiques telles que les asperges. Les agriculteurs affirment que le pays pourrait devenir une réserve agricole aussi importante que le Brésil ou l'Argentine, étant bien positionné pour nourrir une population mondiale en pleine croissance.
Mais le pays souffre de pénuries d'eau sévères sur sa côte océanique et ces dernières devraient même s'aggraver alors que ses champs de glace dans les Andes fondent peu à peu à cause du changement climatique.
A Ica, où le contrôle du pompage de l'eau est très faible, l'aquifère pourrait s'assécher avant que le gouvernement ne mette au point un plan visant à collecter l'eau de pluie provenant des Andes ou de l'Amazone comme elle l'a fait au nord du Pérou.
« Les gens parlent de la terre et de sa valeur. Mais il s'agit de l'eau » a déclaré Jorge Checa, qui gère en co-gestion la ferme de 600 hectares Agricol Athos, qui produit du raisin et des asperges à Ica.
Du fait qu'Ica se trouve juste à côté de l'Océan Pacifique, le risque de sur-exploitation est élevé alors que l'eau de pluie pourrait s'infiltrer dans l'aquifère, et comme dans certaines parties de la Californie, abîmer les terres agricoles.
La demande en eau s'est intensifiée au Pérou alors que le pays a cherché à diversifier son économie. Le Conseil d'exportation du Pérou, ADEX, affirme que le pays a des températures idéales le long de sa côte.
Le Pérou est déjà le principal exportateur mondial d'asperges et le troisième plus grand producteur d'artichauts. Son secteur agricole, qui a attiré une vague d'investissements étrangers, a crû rapidement, aidé par les lois locales autorisant les grandes propriétés terriennes et par les accords de libre échange avec les Etats-Unis et les pays asiatiques.
L'eau manque néanmoins cruellement au pays. La principale source d'eau douce de la côte, les glaciers des Andes, réduit à vue d''il, et les gros investissements dans l'agriculture sont « disproportionnés » par rapport à la quantité d'eau disponible, d'après Raul Roca Pinto, un directeur du ministère de l'agriculture.
Les dunes de sable d'Ica, ville qui se trouve à 250 kilomètres environ de la capitale Lima, cachent une industrie lucrative d'exportation agricole, qui a connu une croissance très importante en dix ans.
D'après David Bayer, un militant écologique, l'aquifère d'Ica s'assèchera d'ici dix ans. Il pense que les six principaux cultivateurs d'Ica 'qui consomment 78% des réserves d'eau souterraine d'Ica- devraient arrêter leur production dans la moitié de leurs terres.
« La crise de l'eau est réelle, et les agriculteurs de petite et de moyenne taille sont menacés » a indiqué David Bayer.
Le déficit d'eau d'Ica est en partie dû à l'inefficacité des systèmes d'irrigation.
D'après les agriculteurs, la seule solution de long terme pour Ica est que le gouvernement sponsporise un projet d'irrigation important.
Les prêts de la Banque Mondiale ont aidé à boucher les canaux qui fuyaient et à réparer les systèmes d'irrigation pour le projet Chavimochic au nord du Pérou, qui a permis d'élargir l'accès à l'eau et d'augmenter les revenus moyens des agriculteurs de la région.