Le rapport de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), Global Tuberculosis Control 2008, publié ce lundi, constate que le rythme des progrès pour endiguer l'épidémie de tuberculose a légèrement ralenti en 2006, l'année la plus récente pour laquelle l'OMS dispose de données. Ces nouvelles informations montrent un ralentissement dans la progression du nombre de diagnostics de cas de tuberculose. De 2001 à 2005, le nombre des nouveaux cas de tuberculose détectés a augmenté à un rythme annuel moyen de 6 %, mais de seulement la moitié, 3 %, de 2005 à 2006.
Pour l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la raison de ce ralentissement se trouve dans certains programmes nationaux qui progressaient à grand pas au cours des cinq années précédentes et qui n'ont pas pu maintenir le rythme en 2006. De plus, dans la plupart des pays africains, il n'y a pas eu d'augmentation de la détection des cas par les programmes nationaux. D'autres études ont également montré que de nombreux patients sont soignés dans le privé ou par des organisations non gouvernementales, confessionnelles ou communautaires, échappant ainsi à la détection par les programmes publics.
« Nous sommes entrés dans une nouvelle ère, a estimé le Dr Magaret Chan, Directeur général de l'Organisation mondiale de la Santé. Pour progresser, il faut premièrement renforcer davantage les programmes publics. Deuxièmement, nous devons tirer parti au maximum du potentiel qu'ont d'autres prestataires de service. Le diagnostic et le traitement de ceux qui en ont besoin se développeront de manière marquée en dressant la liste de ces autres prestataires et en partenariat avec les programmes nationaux. »
Ce douzième rapport de l'OMS sur la lutte mondiale contre la tuberculose s'appuie sur les données fournies à l'Organisation par 202 pays et territoires.
Il y a eu 9,2 millions de nouveaux cas de tuberculose en 2006, dont 700 000 chez des personnes vivant avec le VIH et 500 000 cas de tuberculose à bacilles multirésistants (tuberculose-MR). On estime que la tuberculose a tué 1,5 million de personnes en 2006, auxquelles s'ajoutent 200 000 séropositifs pour le VIH, morts de la co-infection.
Le rapport souligne deux aspects de l'épidémie qui pourraient encore ralentir les progrès. Le premier concerne la tuberculose-MR qui, selon les rapports reçus par l'OMS le mois dernier, atteint les plus hauts niveaux jamais enregistrés. Jusqu'à maintenant cependant, les mesures prises contre cette épidémie n'ont pas été suffisantes. Compte tenu des moyens limités des laboratoires et des services de traitement, les projections des pays indiquent qu'à l'échelle mondiale, seuls 10 % des cas de tuberculose-MR pourront être traités en 2008.
L'association mortelle de la tuberculose et du virus VIH du sida, qui alimente l'épidémie de tuberculose dans de nombreuses parties du monde, notamment en Afrique, constitue la seconde menace pesant sur la poursuite des progrès. Bien que la co-épidémie tuberculose / VIH du sida représente une difficulté majeure, certains pays avancent à grand pas. Près de 700 000 patients atteints de tuberculose ont eu un dépistage du VIH en 2006, contre 22 000 en 2002, un signe de progrès mais encore loin de la cible de 1,6 million, fixée pour 2006 par le Plan mondial Halte à la tuberculose (2006'2015). Les trois pays africains obtenant les taux les plus élevés de dépistage du VIH dans les services de soins de la tuberculose ont été en 2006 le Rwanda (76 %), le Malawi (64 %) et le Kenya (60 %).
« Le rapport nous informe que nous sommes encore loin d'assurer l'accès universel à des services de qualité de prévention, de diagnostic, de traitement et de soins pour le VIH et la tuberculose, reconnaît le Dr Peter Piot, Directeur exécutif de l'ONUSIDA. Il y a eu manifestement des progrès, mais nous devons tous ensemble en faire plus pour adopter une approche commune et faire baisser le nombre des décès dus à la tuberculose chez les séropositifs pour le VIH. »
Le rapport montre également des problèmes de financement. Malgré l'accroissement des ressources, notamment en provenance du Fonds mondial et dans certains pays à revenu intermédiaire, les budgets projetés pour la tuberculose n'augmenteront pas dans la plupart des pays les plus affectés par cette maladie. Des données financières complètes ont été fournies pour ce rapport par 90 pays dans lesquels surviennent 91 % des cas de tuberculose dans le monde. Pour atteindre les cibles fixées pour 2008 par le Plan mondial Halte à la tuberculose, il manque environ US $1 milliard pour ces 90 pays.
« Nous espérons collaborer avec tous les partenaires pour aider davantage les pays à atteindre les cibles fixées pour la tuberculose en 2015 et au-delà, déclare le Dr Michel Kazatchkine, Directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Ensemble, nous pouvons redonner l'espoir aux personnes et aux communautés qui ploient sous l'énorme charge de la tuberculose. »
À l'occasion de la Journée mondiale de la Tuberculose, le Dr Jorge Sampaio, ancien Président du Portugal et Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l'initiative Halte à la tuberculose, a demandé beaucoup plus de détermination contre la co-infection tuberculose-VIH. « La tuberculose est la première cause de mortalité chez les personnes vivant avec le VIH/sida, a-t-il rappelé. Plusieurs pays ont montré qu'on pouvait atteindre les cibles fixées pour la co-infection tuberculose-VIH et ont pris des mesures qui auront des effets pour ceux qui sont les plus exposés. Mais c'est une bataille sans relâche : nous devons agir bien mieux et bien davantage. »